Bien regonflé par cette longue escale a Attapeu, il y a du pain sur la planche : franchir la frontière perchée au sommet d'un massif bien gratiné. Comme un bleu, je m'embarque dans cette étape avec insuffisamment de bouffe. Comme d'habitude, c'est une zone déserte.
Comme cela m'est déjà arrivé ces derniers moi, j'arrive a la nuit au village poste frontière de PhouKhae, déjà en hypoglycémie mais incapable de manger. Je sens tous mes muscles crispés par la tétanie.
Impossible meme de déglutir. La famille qui gère la guesthouse (bcp plus que basique d'ailleurs ! Ça vaut l'espèce de cage a lapin près du shandurr pass au Pakistan !) me trouve sûrement un peu zarrbi ! Je commande une assiette de riz que je stocke en vue du petit dej. Le lendemain matin, tout est rentré dans l'ordre et l'appetit me réveille a 05h.

A 07h je quitte le Laos en plaisantant avec les douaniers souriants et franchement pas stressés. 10 minutes après je me pointe au poste vietnamien ou dans chacun des 6 postes de garde espacés d'au plus qq dizaines de mètres, on me demande de présenter mon passeport d'un air suspicieux. Pr finir la série, il me faut décrocher ttes mes sacoches pr les faire scanner via un tapis roulant. Ils n'avaient pas cette installation la dernière fois que je suis passé a cette douane.

Après tout, ils ne font que leur boulot... Mais en contournant le bouzin pr récupérer mes sacoches a l'autre bout du tapis roulant, je remarque que le douanier de service faisant office d'opérateur scrute avec un intérêt visible un écran noir.

J'essaie de pas trop rigoler qd il vient faire son rapport a sa collègue examinait mon vélo : c'est bon vous pouvez y aller...!

Les routes vietnamiennes

Ma route se met alors au rythme du Vietnam : des files de piétons qui marchent non pas le long de route mais sur la route, une chaussée globalement bonne mais avec des pièges fatals : nid de poule a l'entrée de virage sans visibilité, raccord disjoint avec le tablier d'un pont en bas d'une descente, rocher tenant lieu de cale pr un poids lourd en panne abandonnée en place lorsque ce dernier est reparti, troupeaux en pagaille, etc Pas de priorité. Pour ce qui est des conducteurs au Vietnam, il semble y avoir un usage qui pourrait se résumer par "puisque tout peut arriver, soyons prêt a tout".

Je m'explique : personne ne semble appliquer un quelconque code de la route. Chacun essaie de passer par la ou il peut et a faible vitesse.

C'est donc courant, sur une route simple, d'avoir face a soi une vache doublée par un camion lui-même doublé par un bus. Ceux qui arrivent comme moi n'ont alors plus qu'a se serrer sur le bas côté, la ou ça secoue dans tous les sens.

La ou je trouve une certaine logique c'est que chacun fait cela sans s'énerver, c'est aussi que les gens circulent a faible allure pr adapter leur trajectoire a tous ces événements qui se produisent devant eux.
On le sait, le piéton qui veut traverser gêne la circulation s'il attend que la voie soit libre pr s'élancer. A l'inverse, s'il s'engage lentement, c'est spectaculaire d'observer que l'ensemble du trafic se dévie pr lui permettre de rejoindre le trottoir opposé. C'est assez intimidant les premières fois mais ça marche étonnamment bien!

Cela dit, pr moi, rouler au Vietnam reste un vrai défi lorsqu'il s'agit de rentrer en agglomération ! Alors la c'est chaud bouillant !
Klaxon dans tous les sens, dépassement a gauche et a droite, intersections délicates : il y a souvent du sport !

Route d'Attapeu a PhouKhae. Les aigreurs de Clément :

Un exemple parmi d'autres a propos de la déforestation au Laos. Des entrepreneurs vietnamiens viennent déboiser sauvagement cette région avec de gros moyens mécaniques. Ils repartent avec le bois pr le marché vietnamien. Pourquoi ? Car ils ont déjà coupé toutes les forets pas encore protégées chez eux. Au Laos, même dans les parcs ou les réserves, zones supposément réservées, il n'est ni très difficile, ni très risqué de passer outre. En échange, ils créent des emplois avec des plantations d'hévéa sur les terrains déboisés (une aberration d'un point de vue écologique car l'hévéa en monoculture a cette échelle épuise durablement les sols et n'enraye pas du tout l'erosion. De plus, l'exploitation amateure du latex tiré de l'hévéa n'est pas neutre sur l'environnement), construisent de bonnes routes, financent qq infrastructures et paient des taxes en plus de copieux graissages de pattes ça et la. Ainsi va le monde.

Impressions vietnamiennes

Pour ce troisième voyage au Vietnam, j'ai résolument renoncé a établir d'autres contacts que le strict nécessaire : faire mes achats de subsistance point final. C'est peut être dommage mais d'une part je suis fatigué de buter toujours sur la même incompréhension mutuelle, en particulier le fait qu'on m'annonce un prix multiplié par cinq par rapport a la somme demandée a mon voisin de table. On m'a expliqué que ça n'avait rien de personnel et que je pouvais tout simplement demander a payer le prix normal. Ça a souvent fonctionné il est vrai.
Mais pas tout le temps. Et de plus ça continue de me déplaire comme démarche. Na na nère !
D'autre part, je me focalise sur une autre façon de visiter ce pays.
Moins dans la rencontre au profit de plus d'attention portée sur l'observation solitaire en retrait. Les paysages, les villages, les monuments et parfois les ambiances des rues ou du marché. Intéressant a vivre.

Malgré cette attitude un brin renfrogné, des gens m'ont ici encore tendu la main.

Comme cette famille de restaurateurs a BuonMaThuot.
C'est comme s'il fallait briser la glace
après quoi ils ouvrent toute grande leur porte.